L’entraîneur des U19 Nationaux, témoin privilégié des années ponotes en Division 2, retrace son parcours et pose son regard sur une carrière riche en rencontres et en aventures humaines.

Il est le dernier des Mohicans. Le rescapé de la période faste. Celles des années 1984-1989, lorsque Le Puy s’invitait à la table des grands et se frottait à Saint-Etienne, Lyon, Le Havre, Bastia, Montpellier et tant d’autres, en Division 2 ! 

Pierre-Yves Thomas, c’est l’âme du Puy Foot. Le témoin de la belle époque. Il est le seul, avec, à un degré moindre, David Miallon, à avoir vécu les épopées des Rouge et Noir à Lafayette, puis à Massot.

Ces épopées, il les a non seulement vécues, mais il les a surtout vues de très près : sur le terrain, c’était lui le gardien de but. Le gardien du temple !

Plus de trente ans après avoir écrit les plus belles pages de l’histoire du club, « PYT » (prononcez « Pitt »), comme on l’appelle au club, est toujours au Puy, où il s’est définitivement posé en 2002.  

Saison 1985-1986 au Puy, en D2 !

De Saint-Etienne à l’INF Vichy

Au Puy Foot, le natif de Genève – « J’ai un passeport suisse, mais ça ne me sert à rien ! » -, âgé de 53 ans, a déjà porté de nombreuses casquettes : entraîneur des seniors, des féminines D2, des 14 ans Fédéraux et, depuis trois saisons, des U19 Nationaux.

« J’ai été recruté par Saint-Etienne en cadets nationaux, vers l’âge de 15 ans, j’y suis resté deux saisons » se souvient celui qui était alors installé à Bourg-Argental, au milieu du Pilat, dans la Loire.

Le début d’une belle carrière qui le conduira successivement à l’INF Vichy, centre de formation référence de l’époque, notamment pour les gardiens de but, puis au Puy, à Châtellerault et à Poitiers, où il vivra sa première expérience comme adjoint sur un banc, en Division 2. 

« A Vichy, je suis arrivé au moment où les petits gardiens n’étaient pas à la mode. Je manquais de taille. Jean-Luc Ettori était passé au travers lors de la Coupe du monde 82. J’étais barré par deux gardiens plus athlétiques et plus grands, David Marraud (Nantes) et Claude Barrabé (Montpellier). Alors j’ai été gentiment mis dehors ! Mais je manquais un peu de qualité, j’étais loin des top joueurs. A Saint-Etienne, où j’étais encore lié, je n’étais que le 5e ou 6e gardien »

Cinq sélections en équipe de France Espoirs !

Et voilà que le président du CO Le Puy, Henri Chaize, le contacte pour être doublure à 18 ans, en Division 3 : «  C’est l’année de la montée. Je n’ai pas joué, j’étais réserviste, mais je l’ai vécue ! La saison suivante, la première en Division 2, j’ai manqué les 6 premiers matches et ensuite, j’ai joué ! »

Sous le maillot du Puy, en D2, Pierre-Yves donne de la voix !

Vichy, en proie à des problèmes de gardiens, le rappelle pour six mois « en alternance » avec Le Puy : « J’ai terminé ma formation à l’INF, où j’ai aussi croisé de très bons joueurs comme Papin et Tholot, alors que j’en avais été exclu, c’est rigolo ! Je faisais juste les entraînements et je revenais le week-end pour jouer au Puy ! »

Au CO Le Puy, il est acteur lors des premières saisons de D2 mais Laurent Chatrefoux le remplace. On est en 1988, Pierre-Yves est alors pensionnaire au Bataillon de Joinville sous les ordres de Roger Lemerre, et côtoie des garçons comme Ginola, Eyraud, Prunier, Marquet, Guérin, Meyrieu, Angloma et aussi un certain Thierry Roumazeilles, bien connu ici ! Il est même appelé cinq fois en équipe de France espoirs ! « Le choix du coach du Puy s’est porté sur Laurent, qui était présent aux entraînements. Je n’ai pas disputé un match. L’année suivante, je suis parti à Châtellerault (D2/D3) pendant cinq ans avant de signer en 4e division (National 2) à Poitiers. »

L’arrêt Thomas avant l’arrêt Bosman ! 

A Châtellerault, il joue les syndicalistes. Ce qui lui vaut un an de suspension par la Ligue ! « Avec mon coéquipier Eric Hély, que j’ai retrouvé cette saison sur le banc de l’OL en U19, je me suis battu contre le statut promotionnel du joueur, qui devait payer toutes ses charges. On sortait de l’INF Vichy et on estimait que l’on devait être reconnu comme professionnel. On y est parvenu, mais sans avoir le statut pro. J’étais dans mon bon droit. Il y a quand même eu une avancée. En tout cas, je n’ai pas eu à payer les charges que l’URSSAF me réclamait ! »

Il n’y aura pas eu d’arrêt « Thomas », contrairement à l’arrêt « Bosman » qui, lui, fera beaucoup plus de bruit deux ans plus tard !

Pierre-Yves, sous le maillot de Châtellerault !

Pierre-Yves débarque à Poitiers en 1993 et vit deux accessions en deux ans ! Et voilà le Stade Poitevin, qui a éliminé le Monaco de Sonny Anderson et Youri Djorkaeff en coupe de France, en Division 2 ! « C’est là que j’ai fait mes premières armes comme entraîneur adjoint de Denis Devaux en D2, mais on est redescendu en National. »

Saison 1994-1995, celle de l’accession en Division 2 avec le Stade Poitevin !
1996 : ses débuts d’entraîneur comme adjoint de Denis Devaux au Stade Poitevin !

2002, le retour en Haute-Loire

L’appel du banc ne le quitte pas : il rejoint Chasseneuil-du-Poitou, une petite commune près de Poitiers connue pour abriter le Futuroscope.

Sa première expérience « solo » sur un banc, à Chasseneuil !

Quelques années et quelques accessions plus tard, en PL, PH, DHR et DH, il fait le choix familial de rentrer en Haute-Loire : « J’y suis aussi revenu pour une mutation professionnelle : la commune de Rosières et son maire, envers qui je suis très reconnaissant, Adrien Gouteyron (ancien vice-président du Sénat), m’ont accueilli comme fonctionnaire. La Haute Loire, c’est aussi la région de ma femme, qui est ponote. Ici, il y a une qualité de vie. On est bien au Puy ! J’y ai connu tant de choses, comme ce match mythique en D2 à Geoffroy-Guichard devant 42 000 personnes (42 584 très exactement, saison 1985-86), c’est toute ma jeunesse, ce sont des souvenirs, pour moi, c’est ma ville de cœur, j’y suis très attaché ! »

Lors de la saison 1985-86, à Geoffroy-Guichard, contre Saint-Etienne !
La feuille de match de ce derby de légende !
Captures d’images : www.asse-stats.com

Et puis, sur la route du retour dans le 43, l’USF Le Puy, qui a remplacé le COP, l’appelle pour remplacer le coach des seniors, Maurice Bouquet, en CFA2 : « Malheureusement, le football n’est plus devenu une priorité pour la nouvelle municipalité, et on a fait une saison moyenne. On est descendu. On a failli déposer le bilan. On est reparti avec des joueurs locaux et on est remonté sans perdre un seul match de championnat la saison suivante ! On a même recroisé la route de Saint-Etienne en coupe de France, à Geoffroy-Guichard (défaite 2-1) ! Ce fut l’occasion de croiser Frédéric Antonetti sur le banc, qui fut mon coéquipier au Puy en D2 ! C’était marrant de le retrouver dans le camp d’en face ! Ce match avait mis du beurre dans les épinards. »

LA FEUILLE DE MATCH DE COUPE DE FRANCE !
Captures d’images : www.asse-stats.com
Lors de son retour au Puy, avec la casquette de coach en CFA2 (2002)

Découverte du football féminin

Après plusieurs saisons « yo-yo » entre CFA2 et DH, Pierre-Yves change d’orientation et se tourne vers la D2 féminine : « En 2006, Je suis parti pendant deux saisons avec les filles de Saint-Etienne : on est monté en D1 la première année avant de terminer 4e la suivante ! »

Avec les féminines de Saint-Etienne, en D1 (2007-2008)

Retour au Puy en 2008, d’abord avec les 14 ans Fédéraux puis avec les féminines du Puy Foot 43, la nouvelle entité née de la fusion entre l’USF et l’AS Taulhac en 2009.

Pendant 4 saisons (2013-2017), il dirige l’équipe en D2 : « Au départ, on a récupéré le club féminin d’Yssingeaux qui évoluait en D2, et on a rebâti tout ça ! »

Depuis 2017, il est à la tête des U19 Nationaux, avec lesquels il est en course pour le maintien, même si cette saison, après deux exercices fastes, est beaucoup plus compliquée. « C’est un championnat magnifique ! On se frotte au gratin ! Se maintenir serait exceptionnel. J’ai 11 « premières années » dans un effectif où l’on a axé le recrutement sur des gamins du département. On prépare l’avenir, avec des joueurs qui intègrent la National 3, et même le National pour certains comme Thibault Roure. Le joueur qui veut progresser et qui a du potentiel, ici, il peut franchir les marches. Certains l’ont fait comme Grégoire Celle, que j’avais recruté à Yssingeaux, passé par les sections sportives du collège Lafayette et du lycée Roche Arnaud (Charles et Adrien Dupuis), Mouad Aït-Boulaalam, Fabien Boulamoy ou Richard Mendy, tous dans le groupe National. »

Avec les U19 Nationaux du Puy Foot, cette saison !

Une nouvelle ère…

Sans regret, sans nostalgie, il se retourne sur toutes ces années qui ont défilé depuis son retour dans la cité du Velay, en 2002 : « Mes débuts d’entraîneur ici ont été difficiles, on avait peu de moyen mais déjà une formation intéressante. Quand je suis arrivé, les 18 ans accédaient en Nationaux, la réserve en DH et la Une en CFA2, mais il y avait quelques tensions internes. On a quand même sorti Jérémy Perbet et on lui doit beaucoup, car il a rapporté de l’argent au club grâce à ses différents transferts à l’étranger (Espagne, Turquie, Belgique). Et puis une grosse structure avait été mise en place par Alain Blachon, comme les sections sportives, qu’on essaie de pérenniser. En fait, on s’est débrouillé comme on a pu pendant une dizaine d’années avant que le président Christophe Gauthier n’apporte une autre dimension à son arrivée, en 2009 ; ça a changé la vie et la dimension du club. Aujourd’hui, on est revenu au niveau de mon époque, car il y avait deux poules en D2 dans les années 80. C’est une récompense pour Christophe Gauthier qui a bâti tout ça. Avec la restructuration du stade Massot et des équipements, on arrive dans une nouvelle ère ».